Cette semaine, la Paracha nous fait vivre l’un des événements les plus perturbants de l’histoire de notre Peuple dans le désert.
Replaçons-nous dans le contexte : nous sommes deux années après la sortie d’Égypte, après la traversée de la Mer Rouge, après le don de la Torah. Les enfants d’Israël savent pertinemment que grâce aux efforts déployés par Moïse, D.ieu les a pardonnés de la faute du veau d’or et de l’épisode des explorateurs.
Pourtant, malgré tout le dévouement et l’abnégation dont Moïse fait preuve au cours des pérégrinations du Peuple Juif, il se trouve un individu qui souhaite prendre sa place : Kora’h !
Une première question nous saute aux yeux immédiatement… Mais pour qui se prend-il? Qu’a fait Kora’h dans sa vie qui puisse légitimer une telle démarche ?
C’est alors que la Torah intervient justement à ce propos en disant : « Il prit, Kora’h, fils de… et Datan et Aviram ». Kora’h est le sujet qui a pris. Mais qu’est-ce qu’il a pris ? Où est le complément d’objet ? Un verset avec un sujet, un verbe, mais sans complément.
Rashi intervient en commentant : « Il s’est pris ! Lui-même ! »
Telle est donc la base de la révolte : il faut se prendre pour quelqu’un. Pour qui se prend-il celui-là ? Dans cette remarque se cache le premier symptôme du problème. Alors que lorsque D.ieu demandait à Moïse de prendre des responsabilités et de faire sortir son Peuple d’Égypte, celui-ci : répondit « Mais qui suis-je ? N’est-il pas possible de trouver une personne plus apte que moi ? » Kora’h est donc l’antithèse de Moïse.
La deuxième étape c’est la contestation, l’argumentation et la ridiculisation.
Kora’h conteste le caractère prophétique et spécifique de Moïse en l’invectivant: « Nous étions tous au Mont Sinaï, nous sommes tous égaux devant l’Éternel, pourquoi serais-tu supérieur ? »
Puis il ridiculise Moïse en lui posant des questions d’ordre rabbinique dont les réponses sont tout autant incongrues que les questions elles-mêmes.
Mais l’orgueil exprimé au début risque de mettre en péril sa stratégie et Kora’h le sait bien…. Il lui faut donc montrer que ce n’est pas son égo qui l’a poussé à la révolte, mais le bien commun. Kora’h part ainsi en campagne, il va de porte en porte pour expliquer que son but n’est pas de créer la zizanie, ni de se mettre calife à la place du calife, et encore moins de déstabiliser le peuple (qui vivait très bien). Bien au contraire, il argue que tout le monde va profiter de ses réformes et de sa rébellion contre le pouvoir établi, qu’il y aura des postes pour chacun... En d’autres termes, il se sacrifie pour le bien commun.
Sa chute n’en est pas moins tragique. Kora’h et ses acolytes ont été avalés dans la terre, ne laissant aucune trace d’eux à sa surface, comme oubliés de l’humanité.
Parce que la tentation de révolte d’inspiration Kora’hique est toujours d’actualité : la volonté de se prendre pour quelqu’un au-dessus du lot ou de revendiquer, sous de pseudo-motivations altruistes, un rôle dans la hiérarchie de la société dans le seul but d’assouvir son désir de pouvoir et un égo surdimensionné, est un phénomène familier. Nous connaissons à présent le risque encouru…