Ce n’est pas dans mon habitude de répondre systématiquement aux commentaires des Internautes, même si parfois je les trouve injustes et même, frisant la méchanceté.
Pour autant, après ma chronique sur Pourim où j’ai dénoncé le devoir d’ivresse à outrance, je ressens le besoin de préciser ma pensée afin de ne pas blesser ceux qui ont cru comprendre que je critiquais l’esprit des Farbrenguen avec de la Vodka ou l’idée noble que le ‘Hassidisme se fait d’une consommation d’alcool modérée.
L’idée de cette chronique m’est venue suite à une conférence à laquelle j’ai assisté il y a deux semaines, où le conférencier posait la question de Pourim de façon tout à fait délirante : pour lui, le sens de Pourim était le jour de folie par excellence, comme si les religieux avaient besoin d’un jour par an pour assouvir leur besoin de s’affranchir de leur cadre très réglementé régissant leur comportement tout le reste de l’année.
Cette théorie a fait ressurgir un souvenir de jeunesse qui a vraisemblablement dû me marquer. Agé de cinq ou six ans, j’accompagnai mon père qui faisait la tournée de distribution des Michloa’h Manot pour les Rabbanim de la ville et j’ai alors assisté à une scène peu banale, chez un Rav renommé. Ses élèves étaient en train de chanter « Les Talmidim sont des Géonim et les Rabbanim des Mechugayim » (les élèves sont des génies et les maîtres des demeurés) ; je me souviens encore de la mélodie qui rythmait cette aberration. J’ai cru comprendre avec le temps que, pour beaucoup, Pourim demande une grande préparation afin d’appliquer le strict terme de la Méguila qui dit « Venahapo’h Hou » le retournement de situation. Pour eux, il ne s’agit pas seulement de commémorer du retournement de situation historique, il faut aussi le faire.
Oubliant au passage, que le changement de comportement aurait pu être celui d’une plus grande abnégation et la preuve d’une certaine tolérance envers leurs voisins moins pratiquants… en leur offrant par exemple une petite visite surprise, histoire de montrer que nous sommes tous un même peuple et par là même, les aider a accomplir les Mitsvot du jour. Mais malheureusement, ce n’est pas le genre de la maison et ce n’est pas Pourim qui changera la mise !
C’est cette dérive que je dénonce.
En revanche, je ne dénonce pas ceux qui après une longue journée de Mivtsaim et de lecture de Méguila, boivent un peu plus que d’habitude avec le sentiment d’un devoir inaccompli, car au fond d’eux ils se disent qu’ils auraient pu faire plus. Je ne dénonce pas ceux qui, pour puiser au plus profond de leur cœur des paroles pour toucher le cœur des autres, ont besoin de se sentir un peu plus « on a high » que d’habitude. Je ne dénonce pas ceux qui appliquent la phrase : « grande est la gorgée car elle rapproche les cœurs ». Je ne dénonce pas ceux qui suivent le précepte de la Michna : « il faut faire boire la bête avant de l’égorger », s’agissant d’égorger son mauvais penchant bestial.
J’ai un jour entendu dans un Farbrenguen (oui ça m’arrive aussi de boire !) la différence entre un ‘Hassid qui boit et un autre : d’habitude ceux qui boivent le font pour oublier, tandis qu’un ‘Hassid le fait pour se souvenir. Se souvenir de son âme, de son Rabbi, de sa mission, de son devoir etc.
Jamais l’idée de noyer son chagrin dans l’alcool n’effleurera l’esprit d’un « Le’haim ».
Voilà pourquoi j’ai choisi de répondre aux réactions des Internautes et de ceux qui ont choisi de le faire avec élégance en m’adressant un email personnellement.
Et pour la petite anecdote, cette année à la sortie de Pourim, j’ai passé un coup de fil à un Chalia’h en France pour lui poser une question… Au passage je lui ai demandé s’il avait bu, il m’a répondu : « quand tu as lu onze fois la Méguila dans la journée et que tu organises une Séouda pour des centaines de personnes, tu n’as pas besoin de boire pour sentir la fête ! ».
Chemin faisant…
"L"homme libre est celui qui n'a pas peur d'aller jusqu'au bout de sa pensée." Léon Blum
jeudi 12 mars 2009
mercredi 11 mars 2009
Des chiffres
Depuis une semaine la presse nationale se penche sur la question de l’assimilation. Vendredi dernier le Figaro, dans un article intitulé « Les juifs redoutent leur extinction à terme », démontrait les inquiétudes de la communauté. Dans son édition d’aujourd’hui, c’est au tour du Monde de se pencher sur le sujet, sous le titre : « A Bry-sur-Marne, le rabbin loubavitch en quête de nouveaux croyants ». Non, ce n’était pas une blague de Pourim !
Le phénomène de l’assimilation est simple. Pour un groupe de 100 juifs au départ, des chercheurs ont montré qu’il resterait 3 après quatre générations dans les milieux laïcs. Il en resterait 13 chez les libéraux, 24 chez les conservateurs, 346 chez les modernes-orthodoxes, 2 857 chez les religieux. Mais ceux-ci représentent une très faible proportion de la communauté ! Extinction, donc, de la communauté d'un côté, expansion de l'autre. Avec des clés chiffrées : le taux de fécondité d'une femme du milieu religieux est de 6,9 ; celui d’une femme appartenant au milieu juif laïc est de 1,2. Quant aux mariages mixtes, ils sont de 72 % chez les juifs laïcs et de moins de 1 % chez les juifs religieux.
Le résultat de ces recherches a été présenté la semaine dernière à Paris, lors d’un congrès de Rabbins, par l’ancien grand Rabbin d’Israël et actuel président du mémorial Yad Vashem, Meir Lau.
Le rabbin Farhi, du Mouvement juif libéral de Paris, a tenté de lui répondre en pondérant non pas les chiffres mais les conclusions. Il a fait remarquer que le judaïsme doit s’ouvrir, y compris sa branche orthodoxe, et noté, pour conclure, que si les écoles juives sont pleines, c’est que ces chiffres sont à prendre avec précaution.
Je sais, monsieur Farhi, ces chiffres sont très difficiles pour un responsable comme vous. Votre arrière petit fils risque de se retrouver avec au mieux 10 % du nombre de vos fidèles et au pire 3 %. Oui je sais, il y aura toujours des nouvelles têtes, mais ce n’est tout de même pas rigolo de se dire que le businesse modèle libéral n’est pas pérenne. Les libéraux seront-il en crise : non pas une crise là tout de suite, avec des très fortes baisse de fréquentation etc…, mais une baisse démographique de long terme.
D’ailleurs, en prônant l’ouverture et la souplesse, vous imaginez accepter tout ceux qui se considèrent comme juifs dans votre communauté. Mais ces personnes auront tellement peu à transmettre à la génération future que celle-ci risque de perdre son intérêt pour la religion et du coup se perdre… La démarche me semble tellement « court termiste » que je me m’interroge sur son utilité.
Je ne considère pas que la seule famille légitime soit la branche la plus dure du judaïsme. Mais si tout le monde est gentil, tout le monde il est beau, et donc tout le monde peu rentrer dans la famille sans en accepter toute les contraintes et les implications (du moins les plus importantes) quelle est donc alors cette identification avec la famille ?
Mon père me disait déjà qu’il ne s’appelait pas Rothshild. J’ai voulu insister, rentrer dans leur famille pour toucher éventuellement une part du patrimoine : je leur ai expliqué que je partageais les mêmes valeurs et les même idéaux qu’eux... Malheureusement, pour des raisons dont vous vous doutez, ça n’a pas marché. Et je n’ai rien touché…
Pourquoi en serait-il autrement pour la religion ?
Photo:© Punit Paranjpe / Reuters. www.lemonde.fr
mardi 10 mars 2009
Pourim
Pourim
Bonjour.
Pourim cette année sera avec ou sans pastis, avec ou sans glaçon dans le whisky, avec ou sans copain, avec ou sans terrasse, avec ou sans ivresse, avec ou sans coca, avec ou sans folie, avec ou sans déguisement, avec ou sans pétards, avec ou sans confettis.
Mais Pourim sera toujours avec joie, avec l’écoute de la Méguila, avec les dons d’argent aux pauvres, avec la distribution des deux mets des Michloa’h Manot, avec le grand festin.
Parce que Pourim est authentique, garde sa recette depuis des siècles, transforme les austères en joyeux, les mélancoliques en enthousiastes et réhabilite les accablés, en les laissant savourer l’ivresse d’une victoire le temps d’une journée.
Mais que reste t-il de la dignité ? Chaque année je me pose une question que je n’imagine ne pas être le seul à poser : pourquoi ce jour là est-il celui de tout les excès ? Comment se fait-il que des personnes posées et respectables se retrouvent ce jour là dans un état souvent lamentable, loin de l’attitude digne que l’on serait en droit d’attendre d’elles ? Qui ne les a vues buvant un verre, un deuxième, et encore conscient un troisième et ainsi de suite jusqu’à ne plus savoir à quel verre s’en tenir…
Pourim serait-il, pour une classe se revendiquant dans la tradition, le jour où tout est permis ? Un jour de joie extrême avec tout ses travers ? Un moment de libération qui ne consisterait qu’à mettre en exergue ce que toute l’année certains se refuseraient à exprimer ? La joie permet-elle de faire tomber les règles de bonnes conduites ? De faire tomber les masques ?
Je sais bien j’ai l’air d’un rabat joie : pendant que tout le monde s’éclate et se poivre, moi je regarde et je me moque. Oh que non ! Je sais aussi ce qu’est faire la fête, et pour cause. Mais je ne me suis jamais fait un devoir de m’enivrer au point de me retrouver comme une loque sur le bord d’un trottoir. Vous allez me répondre que dans la loi il est dit « un homme doit se saouler le jour de Pourim jusqu’à ne plus reconnaître entre maudit soit Ahan et bénit soit Mordé’hai ». Voilà c’est écrit : il faut perdre la tête, perdre conscience, boire, et faire le dingue…
En ce qui me concerne, j’assume préférer une forme de festivité un peu différente de celle-là. Oui, il faut sortir de son état classique, oui il faut trouver le moyen de ne plus se sentir limité dans ses propres habitudes. Pourim est le moment d’une élévation comme le jour de Kippour. Comment y arriver ? La réponse n’est pas tant dans ce qu’il faut faire, mais dans la « façon » dont il faut le faire.
Le but de Pourim n’est pas de boire, n’est pas d’être dans un état second, n’est pas de faire le fou ou d’en profiter pour exprimer à la va-vite toutes les frustrations stocké durant une année.
Pourim est un jour sérieux, c’est un grand jour, et justement, parce que c’est un très grand jour que notre conscience dans son « état de fonctionnement » habituel n’est pas capable d’atteindre et d’apprécier. C’est pourquoi nos Sages ont suggéré qu’il fallait sortir de cette posture habituelle pour se permettre s’atteindre le plus haut. Pourim, c’est au-delà de la conscience.
Certains pensent qu’après la conscience il y a l’animal. Et ils se conduisent en adéquation. D’autres pensent qu’après la conscience il y a l’ange et ils se conduisent en conséquence, également.
A chacun de choisir à quel monde il souhaite appartenir. Le choix que vous ferrez pour Pourim ne sera pas innocent. Il sera avant tout le reflet d’une année passée et éclairera l’année à venir. Vous pensez que je vous propose un Pourim « light » ? Non, je vous en propose un vrai, qui vous propulsera pour le reste de l’année, parce que je n’ai pas envie qu’il soit l’expression d’un zéro.
Avec ou sans Coca ?
Bonjour.
Pourim cette année sera avec ou sans pastis, avec ou sans glaçon dans le whisky, avec ou sans copain, avec ou sans terrasse, avec ou sans ivresse, avec ou sans coca, avec ou sans folie, avec ou sans déguisement, avec ou sans pétards, avec ou sans confettis.
Mais Pourim sera toujours avec joie, avec l’écoute de la Méguila, avec les dons d’argent aux pauvres, avec la distribution des deux mets des Michloa’h Manot, avec le grand festin.
Parce que Pourim est authentique, garde sa recette depuis des siècles, transforme les austères en joyeux, les mélancoliques en enthousiastes et réhabilite les accablés, en les laissant savourer l’ivresse d’une victoire le temps d’une journée.
Mais que reste t-il de la dignité ? Chaque année je me pose une question que je n’imagine ne pas être le seul à poser : pourquoi ce jour là est-il celui de tout les excès ? Comment se fait-il que des personnes posées et respectables se retrouvent ce jour là dans un état souvent lamentable, loin de l’attitude digne que l’on serait en droit d’attendre d’elles ? Qui ne les a vues buvant un verre, un deuxième, et encore conscient un troisième et ainsi de suite jusqu’à ne plus savoir à quel verre s’en tenir…
Pourim serait-il, pour une classe se revendiquant dans la tradition, le jour où tout est permis ? Un jour de joie extrême avec tout ses travers ? Un moment de libération qui ne consisterait qu’à mettre en exergue ce que toute l’année certains se refuseraient à exprimer ? La joie permet-elle de faire tomber les règles de bonnes conduites ? De faire tomber les masques ?
Je sais bien j’ai l’air d’un rabat joie : pendant que tout le monde s’éclate et se poivre, moi je regarde et je me moque. Oh que non ! Je sais aussi ce qu’est faire la fête, et pour cause. Mais je ne me suis jamais fait un devoir de m’enivrer au point de me retrouver comme une loque sur le bord d’un trottoir. Vous allez me répondre que dans la loi il est dit « un homme doit se saouler le jour de Pourim jusqu’à ne plus reconnaître entre maudit soit Ahan et bénit soit Mordé’hai ». Voilà c’est écrit : il faut perdre la tête, perdre conscience, boire, et faire le dingue…
En ce qui me concerne, j’assume préférer une forme de festivité un peu différente de celle-là. Oui, il faut sortir de son état classique, oui il faut trouver le moyen de ne plus se sentir limité dans ses propres habitudes. Pourim est le moment d’une élévation comme le jour de Kippour. Comment y arriver ? La réponse n’est pas tant dans ce qu’il faut faire, mais dans la « façon » dont il faut le faire.
Le but de Pourim n’est pas de boire, n’est pas d’être dans un état second, n’est pas de faire le fou ou d’en profiter pour exprimer à la va-vite toutes les frustrations stocké durant une année.
Pourim est un jour sérieux, c’est un grand jour, et justement, parce que c’est un très grand jour que notre conscience dans son « état de fonctionnement » habituel n’est pas capable d’atteindre et d’apprécier. C’est pourquoi nos Sages ont suggéré qu’il fallait sortir de cette posture habituelle pour se permettre s’atteindre le plus haut. Pourim, c’est au-delà de la conscience.
Certains pensent qu’après la conscience il y a l’animal. Et ils se conduisent en adéquation. D’autres pensent qu’après la conscience il y a l’ange et ils se conduisent en conséquence, également.
A chacun de choisir à quel monde il souhaite appartenir. Le choix que vous ferrez pour Pourim ne sera pas innocent. Il sera avant tout le reflet d’une année passée et éclairera l’année à venir. Vous pensez que je vous propose un Pourim « light » ? Non, je vous en propose un vrai, qui vous propulsera pour le reste de l’année, parce que je n’ai pas envie qu’il soit l’expression d’un zéro.
Avec ou sans Coca ?
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