Juste avant l'entrée du Chabbat, je jette un coup d'œil sur les informations et je lis que le Conseil d'Etat refuse de donner la nationalité française à une femme musulmane qui porte la burqa. Je ne vais naturellement pas faire le procès ni de cette femme ni du conseil d'état, en revanche, j'ai passé un moment de mon Chabbat pour réfléchir à une décision qui pourrait se produire pour un juif à qui l'on aurait refusé la nationalité française car il n'aurait pas fait preuve de volonté d'intégration. Je parle volontairement d'intégration et non d'assimilation car pour moi, la différence, c'est que l'assimilation est quelque part la perte de son identité pour une collectivité, tandis que l'intégration est la faculté de garder son identité tout en respectant et en s'intégrant dans les principes et les valeurs du pays d'accueil.
Et voilà que surgit l'idée que chez nous, c'est-à-dire dans le mouvement Loubavitch, le principe d'intégration a été l'objet d'une révolution et au cœur des préoccupations du mouvement depuis plus de 60 ans.
Tout d'abord, nous sommes la seule branche 'Hassidique et en général, le seul mouvement religieux à compter comme leader un homme érudit dans les connaissances Juives, Talmudiques, Kabbalistiques et tout ce qui découle de l'héritage juif, mais en même temps c'est un homme d'une culture générale époustouflante et surtout, ayant suivi des études séculaires très poussées, avec sept doctorats acquis dans la grande Université de Berlin et à la Sorbonne entre les années 1929 et 1938. Je vous parle du dernier Rabbi de Loubavitch, Rabbi Menachem Mendel Schneerson (1902-1994).
Voilà pour moi le premier signe d'un homme, qui sous l'impulsion de son beau-père (l'ancien Rabbi), a compris que pour être un leader incontesté dans un univers religieux, les connaissances religieuses ne seraient plus suffisantes. Un grand visionnaire ! D'ailleurs le nombre de personnes d'univers hétéroclites et variés venues lui demander conseil et guidance, comme des hommes politiques de haut rang, des chefs d'état-major, des professeurs, chercheurs, scientifiques, etc. témoigne des compétences et de l'influence qu'il avait au-delà du monde religieux.
Mais c'est dans un autre aspect aussi que le souci d'intégration existe : l'habillement. En effet, nous sommes le seul mouvement 'Hassidique à ne porter l'habit traditionnel que le jour du Chabbat et encore c'est sans compter le « Shtreimel » (le chapeau en fourrure) qui n'est plus dans la garde-robe des Loubavitch, c'est le chapeau « moderne », pour certains, de marque italienne « Borsalino » (pour ne pas la citer) qui fait office de couvre-chef. Quoi de plus moderne ?
Tout le reste est disponible dans les magasins classiques de prêt-à-porter.
Voilà pour les hommes.
Regardons du côté des femmes. Dans la tradition juive, les femmes ne montrent pas leurs cheveux car c'est une partie du corps considérée comme intime. Comment les couvrir ? Un grand débat s'est ouvert dans les années 60 entre les partisans du foulard et ceux de la perruque. Je ne vais pas rentrer dans les arguments de chacun, mais la conclusion est que le Rabbi de Loubavitch a tranché que la perruque est largement meilleure, car si le foulard montre clairement la volonté de se couvrir la tête, certaines situations de la vie risquent de rendre cette affirmation gênante et par conséquent, le risque de ne pas se couvrir la tête convenablement est possible, alors qu'avec une perruque (souvent très jolie), aucune gêne n'est possible puisque souvent, même l'entourage ne s'en rend pas compte.
J'en conclus que l'intégration dans la société de la femme, d'autant plus avec le nombre grandissant de femmes exerçant un métier, est un souci permanent chez le Rabbi de Loubavitch et il a donc toujours trouvé la bonne solution pour que, d'un côté le respect strict de l'observance de la Torah soit préservé et que de l'autre, la société soit considérée non pas comme une menace à la religion mais comme un outil et un allié à apprivoiser sans pour autant perdre son âme.
Est-il possible d'être un bon juif pratiquant et tout autant intégré dans la société ? Ma réponse est sans équivoque, oui ! Non seulement c'est possible mais c'est un devoir, un devoir pour chacun et chaque jour. Associer le monde qui nous entoure à la mission de le rendre meilleur, ce n'est possible qu'en vivant dans le monde et avec lui. La grandeur du projet inclut chacun à chaque instant. A nous d'être à la hauteur !